La plante
Le Tanacetum parthenium, aussi connu sous le nom de Chrysanthemum parthenium, est le nom latin de la grande camomille, appartenant à la famille des astéracées. Les Anglais la nomment «feverfew », ce nom n’est pas dû à un effet fébrifuge, mais plutôt à une déformation du mot « featherfoil » qui fait allusion à la forme de la feuille qui rappelle celle d’une plume (Houdret et al. 2009).
Sa période de floraison se situe entre juillet et septembre, où la pollinisation assure sa reproduction. Elle possède une forte odeur camphrée et traditionnellement, elle est prise avec du miel pour masquer son goût amer (Houdret et al. 2009).
Il existe trois variétés de camomille médicinale, mais seul le Tanacetum parthenium a des vertus dans le traitement de la migraine. La camomille matricaire (Matricaria recutita) et la camomille romaine (Chamaemeium nobile) diffèrent par la forme de leurs feuilles et l’absence du parthénolide dans leurs actifs (Luder et al.2019). Le Tanacetum parthenium est originaire d’Asie Mineure et des Balkans, puis a été exporté en Afrique du Nord.
Plus tard, il fut introduit dans les Îles britanniques, puis en Europe continentale où, d’abord cultivé à des fins médicinales et ornementales, il s’est progressivement naturalisé. Il fut ensuite transporté en Amérique du Nord par les colons européens.
Histoire de la grande camomille
Au début de notre ère, les textes de Dioscoride décrivirent la grande camomille comme une plante capable de traiter « toutes les inflammations chaudes, du corps et de la tête » (Dioscoride d’Anazarbe 1555). Dans le livre de 1525 « Banckes’s Herbal » elle est décrite pour lutter contre les brûlures d’estomac et/ou les piqûres d’insectes (Banckes’s 1525). Le botaniste anglais John Gérard analysa plusieurs variétés de camomilles, qu’il mentionna comme utiles dans le traitement de la colique, des calculs rénaux et des vertiges.
Par la suite, l’herboriste Culpeper écrivit en 1653, que le Tanacetum parthenium constituait le meilleur remède contre les troubles gynécologiques féminins, et aujourd’hui encore, on l’utilise pour lutter contre l’aménorrhée (Houdret et al. 2009).
C’est seulement au début des années 1700 que le professeur John Hill mit en avant la plante pour le traitement des céphalées : « dans les pires maux de tête, cette herbe excelle dans le soulagement plus que toute autre substance connue » (Van Niekerk et al. 2015). Son usage est ensuite tombé en désuétude.
L’intérêt scientifique pour le Tanacetum parthenium a resurgi vers la fin des années 1970, quand la femme d’un haut responsable de la commission nationale anglaise du charbon eut mâché des feuilles de la plante pour apaiser ses migraines. L’histoire raconte que ce sont les mineurs qui utilisaient régulièrement le Tanacetum parthenium pour diminuer leurs maux de tête. Comme les migraines de la dame cessèrent presque complètement, son médecin, le Docteur Stewart Johnson, de la « London Migraine Clinic », débuta une série d’essais cliniques qui contribuèrent à restaurer la réputation de la plante (Houdret et al. 2009).
Selon la médecine traditionnelle indienne et chinoise, la grande camomille est souvent utilisée en association avec d’autres ingrédients aux propriétés anti-inflammatoires. En Inde, la plante boswellia serata et le curcuma sont très souvent associés au Tanacetum parthenium, de même que l’écorce de Salix Alba.
Composition du Tanacetum parthenium :
Les principes actifs responsables des vertus de la grande camomille sont nombreux. Parmi les constituants qui pourraient contribuer à l’action pharmacologique, figurent en première position les lactones sesquiterpéniques, majoritairement représentées par le parthénolide.
Puis viennent les huiles essentielles et les flavonoïdes qui, de façon synergique, peuvent participer à l’activité du Tanacetum parthenium (Allais et al. 2008). Les huiles essentielles représentent 0,5 à 0,9 % de la plante ; elles sont responsables de sa forte odeur et contiennent une majorité de camphres.
Le parthénolide est considéré comme l’ingrédient actif principal de la plante. Il a été isolé pour la première fois en 1965 (Atta-ur-Rahman 2018). Il est absorbé par la muqueuse intestinale via un système de diffusion passive. Si les lactones sesquiterpéniques ont principalement été étudiées pour expliquer l’activité anti-inflammatoire du Tanacetum parthenium, elles ne sont pas les seules responsables de ses effets.
Des chercheurs s’intéressant aux flavonoïdes de la plante ont montré une activité inhibitrice des cyclo-oxygénases (rôle dans l'inflammation) (Williams et al. 1999 ; Long et al. 2003).
Le chrysanthemum parthenium dans le traitement de la migraine
Longtemps, la grande camomille a été utilisée pour traiter les migraines, mais les essais cliniques rapportent des résultats contrastés.
En 2004, une revue de la littérature basée sur cinq essais cliniques pour un total de 343 patients n’a pas permis de conclure à une efficacité de la plante dans la prévention des crises (Pittler et al. 2004).
Une autre étude a rapporté une réduction de la fréquence des attaques. Aucune différence n’a cependant été observée au niveau de la durée et de l’intensité de la crise.
Plus récemment en 2020, un projet de recherche a montré des résultats significatifs dans la prévention des migraines. Ce laboratoire Inserm avec une société auvergnate ont élaboré deux traitements préventif pour soulager les migraines. Le premier est sous forme de gélule (Herba MIG) et le second en spray nasal (MIG SPRAY)
Les résultats variables des études évaluant l’efficacité du Tanacetum parthenium dans la prévention de la migraine sont essentiellement dus à un problème de méthodologie. Soit la durée de l’étude est trop courte, car les bénéfices de la plante ne se font ressentir qu’après plusieurs mois ; soit les critères d’inclusion ne sont pas correctement définis. L’extrait des plantes utilisées intervient aussi dans la variabilité des résultats obtenus.
Peu d’études dosent la quantité de principes actifs et particulièrement de parthénolide contenu dans leur extrait. Or en fonction de l’extrait (plante entière, feuilles ou fleurs), le pourcentage de parthénolide varie fortement (0 à 5%) (Heptinstall et al. 1992). L’efficacité observée dans l’étude peut être due à cette particularité d’extraction, qui confère à l’ingrédient un taux de principe actif plus important que ceux utilisés dans les autres essais cliniques (Diener et al. 2005).
Outre ses effets anti-inflammatoires, plusieurs autres mécanismes pourraient expliquer l’efficacité de la plante dans la prévention des migraines. La quantité de parthénolide présents dans la plante varie de 0 à 0,5 %. Cette variation s’explique essentiellement par la provenance géographique de la plante, sa maturité au moment de la récolte et le procédé d’extraction utilisé (Majdi et al. 2015; Majdi et al. 2011).
Certains patients sont donc susceptibles de stopper leur traitement par manque d’efficacité, alors qu’une plante de haute qualité, riche en actifs, aurait pu être une aide précieuse!