Soulager la douleur chronique grâce à la neurostimulation

Soulager la douleur chronique grâce à la neurostimulation

29 January 2024

Les douleurs chroniques, indépendamment de leur origine, représentent un défi majeur pour les individus qui en souffrent au quotidien. Il s’agit de douleurs perdurant sur la durée, impactant la qualité de vie des patients et pouvant entraîner des conséquences psychologiques, sociales et professionnelles significatives. Dans ce contexte, la recherche de solutions thérapeutiques efficaces est primordiale. La neurostimulation pourrait-elle offrir une solution efficace contre la douleur chronique ? Qu’entend-on précisément par neurostimulation ?

 

La neurostimulation électrique transcutanée (TENS)


La neurostimulation électrique transcutanée (TENS) est une méthode d'analgésie non médicamenteuse utilisée depuis plus de 30 ans pour traiter les douleurs chroniques, particulièrement reconnue dans la gestion des douleurs neuropathiques périphériques localisées. Utilisée de manière appropriée, son taux de réussite dépasse les 60%.

Cette approche, soutenue par des preuves scientifiques, utilise un courant électrique de faible intensité pour influencer les voies de transmission de la douleur dans le système nerveux, procurant un soulagement symptomatique. Elle se réalise au moyen d'un dispositif portable muni d'électrodes adhésives appliquées sur la peau, ciblant ainsi des points spécifiques du corps.

La TENS est souvent considérée en complément ou en alternative aux traitements médicamenteux des douleurs chroniques, avec des indications principales incluant les douleurs neuropathiques périphériques, les lombalgies chroniques, le syndrome fibromyalgique et les migraines. Cette technique offre ainsi une option thérapeutique polyvalente dans la prise en charge des diverses formes de douleurs chroniques.

 

Mécanismes d’actions


Les mécanismes d'action de la TENS reposent sur deux processus neurophysiologiques clés visant à atténuer la sensation de douleur. En premier lieu, il stimule les fibres nerveuses de gros diamètre (fibres A-beta), responsables de la transmission des signaux tactiles vers le cerveau. Cette stimulation inhibe la transmission des signaux douloureux transportés par les fibres nerveuses de petite taille (fibres C et A-delta), modifiant ainsi la perception de la douleur. En parallèle, la TENS favorise la sécrétion de neurotransmetteurs qui bloquent les récepteurs de la douleur. De manière complémentaire, cette méthode encourage également la libération d'endorphines, des substances naturelles produites par le corps agissant comme des analgésiques naturels. Ainsi, la TENS orchestre une modulation complexe des voies de transmission de la douleur, offrant un soulagement efficace et multidimensionnel.

 

Avantages de cette technique

La TENS présente plusieurs avantages significatifs dans le traitement de la douleur :

  • Elle peut contribuer à la réduction de la consommation de médicaments, offrant ainsi une alternative efficace et potentiellement plus sûre pour soulager la douleur.
  • Elle offre une flexibilité dans son application en fonction des besoins du patient, étant donné qu’elle peut être utilisée lors de chaque épisode douloureux.
  • Elle rend le patient autonome dans la gestion de ses douleurs. En favorisant une approche plus active et participative, cette méthode permet aux individus de mieux contrôler leur propre bien-être et d'ajuster le traitement en fonction de l'intensité de la douleur.
  • Elle se distingue également par sa facilité d'administration ainsi que son faible coût. Cette technique peut parfois même être remboursée par la sécurité sociale sous certaines conditions, telles que l'obligation d'un apprentissage par un professionnel de santé titulaire d'un diplôme universitaire en douleur.
  • Elle est également dépourvue d'effets secondaires majeurs. Les rares effets indésirables signalés sont généralement mineurs, se limitant souvent à une légère irritation cutanée au site de pose des électrodes.

Cependant, il est important de noter certaines contre-indications à la neurostimulation électrique transcutanée. Il est déconseillé d'appliquer la TENS sur une région cutanée lésée ou insensibilisée. De même, l'application sur des régions spécifiques telles que la cervicale antérieure, la région thoracique, les sinus carotidiens, ou l'abdomen chez la femme enceinte est à éviter. La TENS ne doit par ailleurs pas être utilisée en présence d'un dispositif médical implantable actif, pendant la réalisation d'un électrocardiogramme ou d'un électroencéphalogramme, et en cas de thrombose veineuse ou artérielle ou de thrombophlébite. Ces contre-indications soulignent l'importance d'une évaluation médicale approfondie avant d'initier la neurostimulation électrique transcutanée.

 

 

 

La neurostimulation médullaire

La neurostimulation médullaire est un autre dispositif médical contribuant aussi à lutter contre les douleurs chroniques. Son principe est assez semblable à la TENS, puisqu’elle vise à moduler l'activité du système nerveux en utilisant des impulsions électriques de faible intensité.

Néanmoins, son mode d’administration est bien plus invasif. La stimulation électrique est délivrée par le biais d’électrodes implantées chirurgicalement dans les cordons supérieurs de la moelle épinière. Cette technique permet de soulager les douleurs dans 50 à 80 % des cas.

Bien que les mécanismes exacts de l’action de la neurostimulation médullaire demeurent partiellement compris, l’hypothèse prédominante suggère qu’elle entraîne la libération de neurotransmetteurs inhibiteurs, bloquant de ce fait la perception de la douleur par le cerveau. Le courant émis se substituerait ainsi à la douleur. De plus, cette stimulation pourrait influencer les circuits neuronaux pour atténuer l’hyperactivité neuronale associée aux douleurs chroniques.

 

Quand recourir à la neurostimulation médullaire ?

En ce qui concerne la gestion de la douleur, la neurostimulation est envisagée en dernier recours pour la prise en charge de la douleur chronique, particulièrement dans des situations où les traitements médicamenteux ou les techniques non interventionnelles n'ont pas apporté de résultats satisfaisants. Elle est donc considérée comme une option lorsque les autres méthodes de contrôle de la douleur ont échoué.

La Haute Autorité de Santé a par ailleurs établi les indications spécifiques de la neurostimulation médullaire :

  • Les douleurs chroniques d'origine neuropathique persistant depuis au moins un an, après l'échec d'alternatives thérapeutiques (issues d'un syndrome douloureux chronique radiculaire ou tronculaire d'origine diabétique, zostérienne, traumatique ou chirurgicale).
  • Les douleurs chroniques d'origine ischémique, après l'échec d'alternatives thérapeutiques (résultant d'une maladie de Buerger).
  • Les syndromes douloureux régionaux complexes de type I ou II persistant depuis au moins six mois.

 

Un traitement à considérer avec précaution

La neurostimulation reste un traitement loin d’être anodin qui nécessite un certain nombre de précautions. Une évaluation approfondie du patient et des examens complémentaires sont donc nécessaires avant de recommander tout traitement.

Avant d'envisager la neurostimulation médullaire, la réalisation d'un bilan de préimplantation s'impose comme une étape obligatoire. Ce bilan englobe une évaluation de la douleur, une évaluation psychosociale, ainsi qu'une évaluation de la qualité de vie. Il doit être effectué au sein d'une structure spécialisée dans le traitement de la douleur chronique, nécessitant la collaboration d'une équipe multidisciplinaire comprenant au moins un algologue et un psychologue ou un psychiatre. Une IRM médullaire doit également être disponible.

Pour compléter cette procédure, un bilan neurologique doit être effectué. Enfin, des essais de stimulation temporaires doivent être réalisés préalablement à l'implantation pour évaluer la réponse individuelle du patient à cette modalité thérapeutique.

Il est essentiel de noter qu'il existe une probabilité significative de réintervention, compte tenu des risques potentiels tels que le déplacement d'électrode, la fracture d'électrode ou l'infection. Et, bien que l’implantation soit réversible, elle est conçue pour être maintenue à vie.


En somme, la neurostimulation offre des solutions prometteuses pour atténuer la douleur chronique. Tant la neurostimulation électrique transcutanée que la neurostimulation médullaire présentent des avantages significatifs dans la gestion de la douleur, bien que leurs mécanismes et leurs applications diffèrent. La TENS, moins invasive et plus flexible, s'avère efficace dans de nombreux cas, tandis que la neurostimulation médullaire est réservée aux situations les plus sévères. Ces techniques, bien qu'elles ne suppriment pas la source de la douleur, offrent un soulagement précieux, soulignant ainsi l'importance de leur intégration dans les protocoles de traitement de la douleur chronique.

 

Références :

Société Française d’Étude et de traitement de la douleur. (26 février 2021). La neurostimulation électrique transcutanée une thérapie antalgique non-médicamenteuse. 

Dr M. Lévêque, chirurgie de la douleur. La TENS. 

Haute Autorité de Santé. (Mars 2014). Neurostimulateurs médullaires implantables : une technique de dernier recours

Vidal. (27 avril 2023). La neurostimulation médullaire à l’assaut de la douleur neuropathique chronique.

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