Le traitement de crise non spécifique de la migraine

Le traitement de crise non spécifique de la migraine

11 November 2020
Le traitement de crise de la migraine a pour but de diminuer l'intensité et la durée de la crise quand elle arrive. Il existe des traitements spécifiques (c'est-à-dire développé pour traiter la migraine) et des traitements non spécifiques. Le risque principal du traitement de crise est (en plus de la toxicité potentielle) de développer des migraines par abus médicamenteux. Dans ce cas, le médicament lui-même est à l'origine de céphalées, le patient rentre alors dans un cercle vicieux qui nécessite un sevrage strict. Le choix du traitement de crise sera dicté par la réponse aux quatre questions suivantes (Géraud 2015) :
  • Êtes-vous soulagé de manière significative deux heures après la prise ?
  • Votre traitement est-il bien toléré ?
  • Utilisez-vous une seule prise médicamenteuse ?
  • La prise du traitement vous permet-elle une reprise normale et rapide de vos activités ?
Si la réponse est oui à chacune des questions, il est recommandé de ne pas modifier le traitement de crise en l’absence de consommation abusive. Toutefois, les antalgiques combinés à la caféine et aux opioïdes (codéine, opium, Tramadol®, morphine et autres opioïdes forts) ne sont pas recommandés, car ils peuvent induire un abus médicamenteux risquant de chroniciser la migraine, voire de provoquer une addiction. Ils sont donc réservés aux patients ayant des contre-indications absolues aux AINS et aux triptans. Il existe deux grandes catégories de traitements de crises : spécifiques et non spécifiques.
Le Lasmiditan, un nouveau traitement de crise spécifique de la migraine.

Les traitements non spécifiques sont les antalgiques et les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Les traitements dits spécifiques sont exclusivement utilisés pour traiter la migraine : ce sont les dérivés ergotés et les triptans. D’autres substances comme la caféine, les antiémétiques ou les psychotropes sont parfois utilisées comme adjuvants (Agence Nationale D’Accréditation et D’Évaluation en Santé 2002).

Les traitements de crises non spécifiques

a. Le paracétamol

Le paracétamol est très largement utilisé dans le traitement de la migraine et particulièrement en automédication. Pour 80 % des patients, il est considéré comme inoffensif, mais à forte dose, il existe pourtant une hépatotoxicité avérée. Il est aussi en tête de liste des abus médicamenteux induisant des céphalées chroniques quotidiennes (Géraud 2015). Il est souvent associé à de la codéine, de la caféine ou de l’aspirine, et dans plusieurs essais, l’association paracétamol-aspirine-caféine s’est avérée supérieure au placebo et même à l’ibuprofène seul (Derry et al. 2013). Cependant pour le moment, il n’existe pas d’autorisation de mise sur le marché (AMM) spécifique dans le traitement de la crise migraineuse.

 

b. L'aspirine

L’aspirine ou acide acétylsalicylique est la plus ancienne et la plus connue des substances antalgiques. Très répandue, elle est souvent la première et la seule thérapeutique utilisée par les migraineux (Kirthi, Derry, et Moore 2013). Elle doit son action bénéfique à ses trois propriétés : antalgique, mais aussi anti-inflammatoire et antiagrégant plaquettaire. Son efficacité a été démontrée pour des doses allant de 500 à 1000 mg et une AMM a été obtenue dans le traitement des crises de migraine pour l’association aspirine à 900 mg associée à 10 mg de métoclopramide, commercialisée sous le nom de Migpriv (Derry et al. 2017). Le métoclopramide est un antiémétique appartenant à la classe des neuroleptiques. Il agit comme un antagoniste de la dopamine qui permet de prévenir les vomissements. L’action de l’aspirine repose sur l’inhibition des cyclo-oxygénases impliquées dans la synthèse des prostaglandines. Elle inhibe également l’agrégation plaquettaire en bloquant la synthèse du thromboxane A2 (Ornelas et al. 2017).

 

c. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) contre les crises de la migraine

Il existe en France deux AMM pour des AINS dans l’indication des migraines. Il s’agit du Kétoprofène et de l’Ibuprofène, mais dans d’autres études, différents AINS ont également montré leur supériorité sur le placebo dans le traitement des crises de migraine ; il s’agit notamment du Naproxène et du Diclofénac (Xu et al. 2016). Il existe peu de comparaisons directes entre les AINS et aucun d’eux ne se distingue par rapport aux autres. Il ne semble pas non plus exister d’efficacité croisée entre ces traitements (Géraud et al. 2015).

Il est donc recommandé au patient d’en essayer plusieurs pour déterminer le plus approprié. Il existe cependant des effets indésirables, essentiellement au niveau digestif, et doivent être évités à partir du troisième trimestre de grossesse car ils sont susceptibles d’engendrer des malformations fœtales. De plus, les femmes porteuses de stérilets mécaniques ne peuvent pas utiliser les AINS, car ils diminuent l’efficacité contraceptive en réduisant l’inflammation de la muqueuse utérine. Les AINS peuvent aussi être utilisés comme traitement de fond (Baena et al. 2017).

Leur mode d’action sur la migraine reste mal connu mais leur intervention inhibitrice, comme c’est le cas pour l’action de l’aspirine, ne semble pas être le seul mécanisme des AINS. L’Indométacine, qui est un puissant inhibiteur des cyclo-oxygénases n’a pas d’effet préventif démontré dans la migraine (Géraud et al. 2015). Il en est de même pour l’effet anti plaquettaire, car l’aspirine à la dose de 160 mg n’a pas d’efficacité préventive dans la migraine, alors que pour cette dose, son action d’antiagrégant est très importante (Buring et al. 1990). Les AINS n’ont pas d’AMM dans la prophylaxie migraineuse, car le risque de gastrite ou d’ulcères limite leur utilisation à long terme.

d. Les antalgiques opiacés

Malgré les recommandations de la Haute Autorité de Santé qui conseille d’éviter les opioïdes (Codéine, Tramadol, Morphine et autres opioïdes forts), ils sont encore largement prescrits et utilisés, bien qu’ils augmentent souvent les nausées et les vomissements. Ils tiennent la seconde place de la liste des médicaments antalgiques induisant des céphalées chroniques quotidiennes (Thorlund et al. 2016). Le plus largement prescrit est la Lamaline®, qui contient 1 mg de morphine par gélule ou 3 mg en suppositoire (Marmura et al. 2015). Malgré cette utilisation très courante chez les migraineux, aucune étude spécifique n’a rapporté un effet bénéfique des opiacés dans le traitement de la migraine (Agence Nationale D’Accréditation et D’Évaluation en Santé 2002).
Voir aussi : Le traitement de la migraine durant la grossesse.

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