Douleurs neuropathiques et stress : comment sont-ils liés ?
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Fatigue persistante, sommeil chaotique, douleurs diffuses dans tout le corps… Pour les personnes atteintes de fibromyalgie, chaque jour peut devenir un combat silencieux. Ce syndrome chronique, encore trop mal compris, se manifeste par une multitude de symptômes : douleurs musculaires, troubles du sommeil, anxiété, dépression, hypersensibilité, instabilité de l’humeur, voire isolement social.
Mais un facteur semble aggraver tous les autres : le stress. Véritable déclencheur ou amplificateur, il entretient un cercle vicieux difficile à briser. Pourtant, des chercheurs, des professionnels de santé (médecins, psychiatres, rhumatologues) et des centres spécialisés s’accordent : une prise en charge globale, combinant approches médicales, thérapeutiques et outils naturels, peut soulager les symptômes, améliorer la qualité de vie, et redonner du pouvoir au patient fibromyalgique.
Dans le cadre des causes, symptômes et du diagnostic de la fibromyalgie, le lien entre douleur et stress apparaît comme un mécanisme central, souvent sous-estimé, mais essentiel à comprendre pour améliorer la prise en charge du syndrome.
Sommaire
Une douleur est le résultat de la stimulation d’une ou plusieurs fibres nerveuses spécialisées dans la perception des douleurs. Le stimulus, d’origine mécanique, chimique ou thermique, va déclencher un mécanisme de transmission d’informations grâce à des récepteurs appelés nocicepteurs.
Les nocicepteurs sont localisés au niveau de la peau, des muscles, des articulations, etc. Ils vont permettre de traduire un stimulus en un influx nerveux pour véhiculer une information en direction du système nerveux central.
La douleur neuropathique est une forme de douleur chronique qui résulte d'une lésion ou d'une maladie affectant le système somatosensoriel. Elle est souvent associée à des pathologie neurodégénératives comme la maladie de Parkinson. Les patients atteints de douleur neuropathique peuvent ressentir une variété de symptômes, y compris une douleur intense, une sensibilité accrue à la douleur, ou une douleur en réponse à des stimuli qui ne sont normalement pas douloureux, on parle d'allodynie. Souvent ces patients sont également suivis dans les centre anti-douleurs , où la prise en charge peut-être pluridisciplinaires et accompagnée de soin paramédicaux.
Le système somatosensoriel est un réseau complexe de capteurs sensoriels et de voies nerveuses dans le corps qui permettent aux individus de percevoir différentes sensations physiques. Ces sensations comprennent la pression, la température, la douleur, le toucher et la perception de la position et des mouvements de notre corps. Ces informations sont recueillies par les récepteurs sensoriels de la peau, des muscles, des articulations et sont transmises au cerveau pour être interprétées. Ainsi, le système somatosensoriel joue un rôle essentiel dans notre interaction avec notre environnement et dans le contrôle de nos mouvements.
Selon l’Inserm, près de 30 % des adultes souffrent de douleurs chroniques , un trouble qui touche plus souvent les femmes et s’aggrave avec l’âge. Dans le cas de la fibromyalgie, ces douleurs sont diffuses, persistantes, souvent liées à des troubles du sommeil, de l’humeur ou de la santé mentale. Elles ne sont plus de simples symptômes, mais un syndrome douloureux à part entière.
Ce syndrome polyalgique idiopathique s’accompagne souvent d’ anomalies du système nerveux, qui devient hypersensible à la douleur. Les patients décrivent des difficultés à dormir, des maux de tête, une fatigue chronique et un impact profond sur leur vie quotidienne.
Pour réduire la douleur, des approches complémentaires sont validées cliniquement : exercice physique doux, médecine thermale, alimentation adaptée, techniques de relaxation, ou encore éducation thérapeutique. Ces stratégies aident à gérer le stress, améliorer la qualité du sommeil et à alléger la charge de la fibromyalgie au quotidien.
Les douleurs neuropathiques peuvent être la répercussion de plusieurs pathologies.
Parmi elles, on peut citer les polyneuropathies dans le cas de troubles du métabolisme (comme le diabète), des troubles de l’irrigation sanguine des extrémités (dans le cas de maladie d’occlusion artérielle).
Des douleurs neuropathiques peuvent également survenir après des infections virales (zona aigu), une névralgie trigéminale, dans le cas des douleurs rhumatismales (comme la fibromyalgie), après une amputation (on parle alors de douleur fantôme). Une atteinte nerveuse due à la compression chronique d’un ou plusieurs nerfs (syndrome du canal carpien, sciatique, hernie discale, ostéoporose…) ou due à l’ installation d’une tumeur, ou des atteintes nerveuses toxiques peut aussi engendrer des douleurs neuropathiques.
Une douleur neuropathique peut être perçue de différente manière. Des sensations anormales, non douloureuses, peuvent se manifester telles que des picotements ou des engourdissements. Ces sensations correspondent à une forme de paresthésie ou de dysesthésie.
La manifestation de douleur neuropathique peut être plus envahissante dans le cas des déficits sensoriels neurologiques qui induisent des zones douloureuses et d’autres défaillances en fonction de la localisation de la lésion (déficits moteurs, cognitifs, etc.).
Globalement, les douleurs neuropathiques se font sentir par des douleurs persistantes (brûlures), ou courtes, mais répétitives (douleurs électriques, spasmes…). Des sensations désagréables, une hypersensibilité douloureuse au moindre contact, et des douleurs irradiantes.
Le stress est un phénomène qui se traduit par une réaction émotionnelle et physique qui permet à l’organisme de réagir de manière rapide à une perturbation de l’environnement.
Il se traduit de manière différente chez chaque individu, mais est majoritairement perçu comme quelque chose de désagréable à porter. Le stress est souvent vécu comme douloureux.
Dans une situation de stress, le corps perçoit une menace et tente d’y répondre en activant la sécrétion de catécholamines par la voie du système nerveux sympathique (adrénaline et noradrénaline) et des hormones neuroendocriniennes (cortisol). Ceci va induire une augmentation du rythme cardiaque, de la pression artérielle et de la respiration.
Sur le court terme, cette réaction est pro-inflammatoire, une production de cytokine a en effet été observée lorsque le corps est en situation de stress (molécules impliquées dans le processus de l’inflammation). La sécrétion de l’ensemble de ces hormones permet au corps de réagir de manière rapide et efficace (du moins en théorie, c’est la loi du « combat ou fuit »).
Le stress est une réponse biologique naturelle face à un danger ou à une menace perçue. Il prépare le corps à réagir rapidement, ce que l’on appelle communément la réaction de «lutte ou fuite». À court terme, cette réponse peut être bénéfique. Mais lorsqu’il devient chronique, le stress peut avoir des effets délétères sur l’organisme, en particulier chez les personnes souffrant de douleurs persistantes.
Dans le cas de la douleur neuropathique, le stress chronique augmente la production de cytokines pro-inflammatoires, amplifie l’inflammation, et modifie les mécanismes de perception de la douleur. Cela peut conduire à une exacerbation des symptômes et à une impression de douleur plus intense.
Par ailleurs, le stress prolongé est fortement impliqué dans un phénomène appelé sensibilisation centrale, qui rend le système nerveux anormalement sensible aux stimuli, même les plus faibles. Ce mécanisme est également bien connu dans d’autres pathologies chroniques comme la fibromyalgie ou la migraine.
Sur le plan neurologique, il y a un continuum entre le fonctionnement du système sympathique (action rapide et immédiate) et du système parasympathique (permet le fonctionnement du corps au repos, tels que les battements du cœur ou la digestion).
Le système nerveux sympathique permet l’état d’éveil, de vigilance et d’action rapide et efficace de l’organisme. Pour ce faire, il permet la mobilisation d’énergie via les réserves de glucose de l’organisme (en activant l’utilisation des voies de stockage ou en dégradant certains types de tissus).
Le système nerveux parasympathique permet le fonctionnement du corps au repos. Plus précisément, il permet au corps de récupérer au repos. C’est-à-dire, de refaire les stocks d’énergie, de réparer les tissus lésés et de veiller au maintien de l’immunité.
Ces deux systèmes doivent fonctionner en équilibre sur le long terme. S’il y a une discontinuité dans cet équilibre, l’organisme ne peut fonctionner de manière optimale.
Le cortisol est une hormone dite catabolique, produite par les glandes surrénales. Tout au long de la journée, cette hormone permet le maintien de la glycémie normale afin d’assurer l’approvisionnement du cerveau et des tissus neuromusculaires en énergie (plus précisément en glucose).
En effet, c’est une hormone anti-inflammatoire très puissante qui a pour fonction de mobiliser rapidement de l’énergie à partir des réserves de glucose de l’organisme. Lors d’un stress prolongé, il y a un dysfonctionnement du cortisol et donc des vecteurs de l’inflammation.
Lors d’une situation de stress, le cortisol va être sécrété en plus grande quantité pour fournir à l’organisme, les moyens de répondre rapidement et efficacement à une perturbation de l’environnement. Le glucose qu’il permettra de mobiliser servira de support d’énergie pour le cerveau afin qu’il adapte une prise de décision rapide, et pour les muscles afin de préparer le corps à réagir à l’information transcrite par le cerveau.
Chez l’Homme, l’inflammation induite par le stress est impliquée dans des maladies telles que l’ostéoporose, la polyarthrite rhumatoïde, la myopathie, la fibromyalgie, le syndrome de fatigue chronique, les douleurs pelviennes chroniques, le dysfonctionnement de l’articulation temporomandibulaire, les lombalgies chroniques, la sciatique, etc. (4).
Le cortisol, dû au stress chronique, entraîne une réponse inflammatoire et induit un stress oxydatif. Le stress oxydatif se définit par l’altération des radicaux libres de certaines molécules accélérant l’apoptose (processus de dégénérescence cellulaire) et donc le vieillissement et la dégénérescence systémique des tissus.
Les symptômes visibles du stress chronique seront liés à la fatigue des os et des muscles, une dépression, des douleurs physiques et psychiques, des troubles de la mémoire, une dérégulation acido-basique de l’organisme (lié en grande partie au stress oxydatif, et qui accentuera les risques de blessures), une hypotension orthostatique et une altération du réflexe lumineux oculaire. Le stress chronique se répercute donc sous la forme d’ évènements multifactoriels contribuant à de très nombreuses maladies inflammatoires et un épuisement du système immunitaire.
Chez les personnes souffrant de fibromyalgie, les douleurs diffuses et les troubles du sommeil, comme la somnolence diurne ou le manque de sommeil profond, ne sont que la partie visible d’un syndrome complexe. De nombreuses études cliniques montrent que le stress chronique joue un rôle central dans le développement de la maladie et dans la persistance des symptômes.
Ce lien entre stress et douleur n’est pas seulement psychologique. Il repose sur des mécanismes biologiques bien connus. En cas de douleur liée au système nerveux, le cerveau et la moelle épinière deviennent hyperactifs, entraînant une hypersensibilité généralisée, typique des patients atteints de fibromyalgie.
Le stress, en activant en continu l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, finit par épuiser le cortisol, notre hormone de régulation. Ce dérèglement aggrave les douleurs, la fatigue, l’anxiété, voire les troubles de l’humeur. Un cercle vicieux s’installe.
Mais il est possible de briser cette boucle . Des solutions validées existent : activité physique douce, relaxation, pleine conscience, cure thermale, TCC … En parallèle, un accompagnement médical ou un programme structuré peut améliorer la qualité de vie et aider à mieux gérer la douleur.
"La douleur neuropathique et le stress se nourrissent mutuellement, créant un cycle qu’il est essentiel de briser pour améliorer la qualité de vie."
La solution la plus efficace pour se débarrasser des douleurs neuropathiques est d’anticiper la mise en place de ces douleurs. Pour ce faire, il est important de réaliser une anamnèse (antécédents médicaux) et un diagnostic du patient de manière précoce. Ce diagnostic doit se faire sur les antécédents médicaux du patient, un examen physique et neurologique et une éventuelle preuve objective apportée par des procédés électrophysiologiques ou d’imagerie en coupe (TDM, IRM).
L’anamnèse se compose en général des questions suivantes : Quand sont apparues les douleurs ? Où et à quel moment surviennent les douleurs ? À quelle fréquence, à quelle intensité et à quel moment de la journée ? Comment s’expriment-elles ? Qu’est-ce qui accentue ou diminue ces douleurs ? Y a-t-il d’autres symptômes qui accompagnent ces douleurs ? Comment impactent-elles votre qualité de vie (Travail, social, famille) ?
Ensuite, concernant l’examen médical, l’état physique général sera d’abord analysé, s’en suis l’examen neurologique. L’examen neurologique comprendra le contrôle des réflexes, de la motricité générale et de la sensibilité à la douleur, à la température, à la compression et au contact. Une mesure de la vitesse de conduction nerveuse par électroneurographie peut également être faite en cas de douleurs neuropathiques. Ce diagnostic peut être fait par votre médecin traitant. Il se chargera ensuite de vous orienter vers un spécialiste en fonction de l’origine des douleurs neuropathiques.
Dans la plupart des cas, il vous orientera vers un neurologue. Mais il peut aussi vous diriger vers un orthopédiste si la douleur provient d’une maladie musculosquelettique, vers un nutritionniste dans le cas de diabète insulinorésistant, vers un immunologiste, un toxicologue ou des médecins spécialisés dans les maladies infectieuses.
Le premier traitement qui peut être prescrit concernera en majorité un traitement antidouleur, qu’il soit médicamenteux ou non. Il est fondamental de traiter ou soulager au plus vite la douleur. En effet, lors de douleur prolongée, le corps mettra en place une douleur dite mémoire, qui entraînera des états douloureux plus difficiles à traiter. Dans le cas de neuropathie diabétique douloureuse, le traitement adéquat sera prescrit (stabilisation de la glycémie). Si la douleur résulte de l’écrasement d’un nerf, une opération chirurgicale pourra dans certains cas régler le problème.
Les douleurs neuropathiques induisent généralement un traitement long. Une association de plusieurs médicaments est très fréquemment nécessaire afin de soulager efficacement la douleur et améliorer la qualité de vie du patient. Certains analgésiques peuvent être délivrés sans ordonnance, il faudra cependant faire très attention à l’automédication et au surdosage dans ces cas. Pour combatte la douleur de manière efficace, on pourra prescrire sur ordonnance, des antidépresseurs, antiépileptiques et analgésiques opioïdes. Ces derniers sont parfois additionnés dans un traitement.
Il est parfois possible d’éviter la prise de substances médicamenteuses. Des thérapies physiques peuvent limiter la douleur et améliorer le confort de vie.
Parmi ces thérapies, on retrouve les traitements thermiques (relaxants, spasmolytiques), de la cryothérapie (pour les douleurs inflammatoires aiguës), de la balnéothérapie ou de la physiothérapie (kinésithérapie, massage). Certains ont recours à l’acupuncture en complément d’un traitement médicamenteux pour soulager les symptômes de la neuropathie. Il existe des traitements par neurostimulation électrique transcutanée (TENS). Ce sont des méthodes analgésiques par des électrodes appliquées sur la peau, au niveau de la zone douloureuse. Cette méthode permet de cibler la douleur et d’inhiber les récepteurs nociceptifs (impliqué dans la transmission de la douleur).
D’autres patients réussissent à améliorer leur confort de vie et diminuer la douleur grâce à certains exercices tels que la relaxation, la méditation, l’hypnose ou encore, une méthode appelée le biofeedback. Ils ne permettent pas de guérir des douleurs neuropathiques, mais ils aident à rendre la douleur plus supportable.
Le cannabidiol est une substance connue pour ces effets relaxants. En effet, le chanvre interagit avec le système endocannabinoïde et stimule donc la synthèse de sérotonine et de dopamine, deux hormones impliquées dans le bien-être.
https://actaneurocomms.biomedcentral.com/counter/pdf/10.1186/s40478-021-01131-8.pdf https://journals.sagepub.com/doi/pdf/10.1177/1744806919840098 https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30857460/ https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28325815/
La douleur neuropathique résulte de lésions affectant le système somatosensoriel.
Le stress peut aggraver cette douleur via l'inflammation et la sensibilisation centrale.
Le stress peut aggraver cette douleur via l'inflammation et la sensibilisation centrale.
Les approches comme la méditation ou la thérapie cognitive peuvent aider à réduire les impacts.
Des recherches explorent des traitements combinant gestion du stress et réduction de l'inflammation.
La douleur neuropathique est une douleur chronique causée par des lésions ou des maladies du système somatosensoriel, caractérisée par des sensations anormales comme l’allodynie.
Le stress aggrave la douleur neuropathique en augmentant l’inflammation et la réactivité du système nerveux, notamment via la sensibilisation centrale.
La sensibilisation centrale est un phénomène où le système nerveux devient hypersensible, amplifiant la douleur ressentie même en l’absence de stimuli nocifs.
La thérapie cognitivo-comportementale, la méditation, et des interventions ciblant l’inflammation sont efficaces pour soulager les symptômes.
Oui, la douleur chronique peut perturber l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, contribuant au stress chronique et créant un cercle vicieux.