Dysfonctionnement des mitochondries

Le dysfonctionnement mitochondrial impliqué dans les migraines

10 November 2020
Dans les années 1930, il a été émis l’idée que la migraine soit associée à une diminution de la glycémie (Gray et al. 1935). Malgré cette hypothèse de l’existence d’une relation entre la migraine et un dysfonctionnement mitochondrial énergétique du métabolisme, la majorité des recherches se sont orientées sur les aspects vasculaire, neurovasculaire et neurologique de la maladie. Il faudra attendre les publications de Willem Amery en 1982 pour que réapparaisse cette hypothèse, dans laquelle un désordre métabolique est impliqué dans la pathogenèse des migraines (Amery 1982). Depuis, plusieurs éléments scientifiques se sont ajoutés, renforçant l’hypothèse que les migraines pourraient, au moins partiellement, être dues à un syndrome déficitaire d’énergie.

Dysfonctionnement mitochondrial

Chez des patients migraineux, il a été montré que des marqueurs du métabolisme énergétique, comme l’adénosine triphosphate (ATP), le lactate, qui joue un rôle fondamental dans la glycolyse anaérobie, ou le magnésium, cofacteur essentiel pour la production d’ATP étaient modifiés. En effet, il a été observé une diminution de l’ATP du cerveau entre les crises chez des migraineux avec aura, comparé à des patients sains (Lodi et al. 2001). Une réduction du magnésium cytosolique libre a été observée au niveau des lobes occipitaux pendant et entre les crises (Ramadan et al. 1989). Quant au lactate, les données semblent varier selon les études, avec un taux plus élevé chez des patients migraineux avec aura, mais ces résultats n’ont pas été reproduits chez des patients sans aura (Reyngoudt et al. 2011; Watanabe et al. 1996). Le taux de phosphocréatine (molécule de créatine phosphorylée riche en énergie, utilisée dans les muscles lors de la synthèse de l’ATP) est diminué chez le patient migraineux alors que le niveau d’adénosine diphosphate est augmenté (Montagna et al. 1994) ; cela signe un faible niveau énergétique intracellulaire, ainsi qu’un probable dysfonctionnement mitochondrial. Ces conditions peuvent conduire à l’incapacité des neurones à faire face à un besoin énergétique accru, rendant alors le cerveau des patients migraineux plus sensible à certains stimuli, à l’origine du déclenchement de la crise.

 

Un manque d’ATP perturbe le fonctionnement des pompes ioniques des neurones, les membranes se dépolarisent et un afflux intracellulaire de Ca2+ cause la libération massive de glutamate (De Baaij et al. 2015). Ce dernier entraîne une dépolarisation massive des neurones en cascade et à terme, un dysfonctionnement neuronal sévère. Cette dépolarisation massive des neurones n’est pas sans rappeler la DCE que nous avons décrite précédemment.

L’un des éléments qui a orienté nombre de recherches concernant les migraines vers l’aspect métabolique est l’étude du syndrome de MELAS, maladie génétique provoquée par des mutations de l’ADN mitochondrial, et qui associe comme son acronyme l’indique une myopathie (M), une encéphalopathie (E), une acidose lactique (LA) et des pseudo-accidents vasculaires cérébraux (S). En plus de ces symptômes, on peut retrouver des céphalées unilatérales d’apparition brutale, des troubles de la vision de type diplopie ou scotome, des difficultés d’élocution, des nausées ou vomissements et une douleur exacerbée lors de l’activité physique. Autant de signes que l’on retrouve aussi chez des patients migraineux (Kugler et al. 2007) et qui permettent de suggérer que la migraine pourrait être aussi associée à une altération métabolique, mettant en jeu les mitochondries.

Lors de la glycolyse, les mitochondries transforment le pyruvate en acétyl-CoA puis au cours d’une chaine respiratoire en ATP et lactate (Dimauro et al. 2004). Chez le patient migraineux, un dysfonctionnement de cette chaine respiratoire pourrait expliquer les variations du métabolisme énergétique du patient (Gross et al. 2019).

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